Les armuriers-forgerons d'Olmart

 

La majeure partie des armes et des armures qui vous sont présentées dans la section Armes de la rubrique Artefacts sont des créations venues de la ville d'Olmart, en Hiscontie. Cette cité abrite en effet un corps de métier unique en son genre, presque spécifique à la ville, et qui la caractérise partout ailleurs dans le pays : je veux parler des armuriers-forgerons.

Les armuriers-forgerons ont toujours existé à Olmart. En fait, leur métier a été inventé il y a très longtemps, à l'époque où les futurs Olmartois n'étaient encore que des nomades à demi barbares, parcourant les steppes du Sud, bien avant qu'ils ne s'arrêtent pour fonder une ville, puis entrer sous la domination du roi d'Hiscontie Henyas III vers l'an 1100. En ce temps-là, les barbares Guyree (prononcez : "guïré"), comme les appelaient les autres nomades pré-hiscontes, étaient animés de moeurs pour le moins belliqueuses. Leur mode de vie était fondé sur les rapports de force au sein de la société. Les différentes tribus, au nombre d'une quinzaine, passaient leur temps à se combattre entre elles, quand elles n'étaient pas occupées par leurs propres luttes intestines.

Un barbare guyree - dessin de LlevDe cette époque date le code du Wanna-lag, ou "loi de guerre", qui définissait la façon dont un bon Guyree pouvait - et devait - combattre ses adversaires. Ce code stipulait que chaque guerrier guyree était en droit de fabriquer sa propre arme différente de celle de ses compagnons ; dans la philosophie guyree, l'arme, l'outil de combat, était le symbole de la puissance virile qui animait les combattants, et à ce titre, elle se devait de surprendre, par sa force, par sa ruse ou par sa cruauté selon le caractère de son possesseur. L'arme reflétait la façon dont se battait celui qui en usait. Evidemment, il était hors de question de donner ou de prêter son arme une fois celle-ci achevée.

Avant de devenir un guerrier affirmé, chaque guyree devait forger sa propre arme et sa propre armure. Mais bien entendu, tous les guyrees n'étaient pas rompus aux techniques de travail du métal, dont ils avaient pourtant besoin pour la réalisation de leur équipement. Pour contourner cet obstacle, ils faisaient appel à des armuriers-forgerons, des barbares spécialisés dans la conception et la réalisation des armes. Tout adolescent en passe de devenir guerrier pouvait avoir recours à un armurier-forgeron pour forger son arme. Mais cependant, l'armurier-forgeron n'était qu'un assistant ; son savoir-faire couvrait uniquement la façon de chauffer et modeler le métal pour lui donner la forme voulue, ainsi que les différents procédés artisanaux nécessaires à l'achèvement de l'arme (conception de la garde d'une épée, du manche d'une lance, etc.). C'était au guerrier lui-même d'imaginer son futur instrument de combat, de façon à l'adapter à sa force physique d'une part, à sa stratégie et à sa philosophie de combat d'autre part. Lui seul devait réaliser les plans de son arme personnelle.

Bien entendu, certaines armes se ressemblaient fatalement, mais avec le temps les guerriers mirent un point d'honneur à concevoir des armes de plus en plus différentes les unes des autres, au point qu'il était impossible, avant le début du combat, de connaître la façon dont votre adversaire allait s'y prendre pour vous attaquer. Bien sûr, lorsqu'on se battait plusieurs fois avec la même personne, on finissait fatalement par apprendre à contrer ses attaques, mais l'effet de surprise était bien souvent fatal, car chaque arme étant différente des autres, possédait des utilisations qu'il était impossible de soupçonner....

 

De là vient le goût qu'ont toujours les armuriers olmartois pour les armes complexes. Ces armuriers-forgerons sont les descendants de cette caste des forgerons guyrees de l'ancien temps. Cependant, ils ont évolué et ont acquis de nouvelles compétences, puisque désormais leur métier n'est plus seulement de fabriquer des armes, mais aussi d'en concevoir l'idée et les plans. Il existe de multiples forges d'armuriers-forgerons à Olmart, mais les clients se disputent les dernières créations des plus célèbres. Chaque armurier-forgeron possède un caractère et un style qui lui sont propres, et forge ses armes en respectant un certain état d'esprit. Il y a les spécialistes des armes puissantes et dévastatrices, celles qui peuvent tuer d'un seul coup de front ; il y a ceux du harcèlement, dont les armes permettent de multiplier les attaques mineures jusqu'à épuiser l'ennemi ; il y a les adeptes des armes sournoises, celles qui paraissent presque normales, celles qui semblent quasiment inoffensives, mais dont la morsure est plus mortelle que celle de l'épée la mieux aiguisée... il y a enfin les forgerons des armes complexes, composées d'une multitude de petites pièces de métal, de véritables ouvrages d'art dignes de la boutique d'un horloger, et dont le premier venu ne saurait même pas distinguer le fonctionnement tant leur maniement nécessite un entraînement rigoureux. Toutes ces armes sont bien différentes, d'usages et de tailles, car si certaines sont plus petites qu'un doigt, d'autres sont plus grandes qu'un homme.

Les armes des armuriers-forgerons sont fabriquées sur commande, selon un processus presque inchangé depuis l'époque des guyrees : le client et l'armurier travaillent ensemble à la conception des plans détaillés de l'arme, afin de l'adapter au mieux aux besoins de son futur propriétaire ; puis l'armurier réalise l'arme elle-même. Le temps de réalisation peut aller de quelques jours à plusieurs semaines, voire plusieurs mois, suivant la complexité de l'instrument à fondre... et les commandes déjà en attente. Les meilleurs armuriers-forgerons, les plus célèbres, sont si accablés de demandes, qu'ils sont parfois contraints de refuser des clients. Certains ne se privent d'ailleurs pas de faire une sélection parmi les commandes selon leurs envies personnelles, renvoyant les autres sans le moindre égard - et si le client refusé n'est pas content, il a tout intérêt à ne pas trop le montrer, car les armuriers savent se battre... ils connaissent le fonctionnement de toutes les armes qui sortent de leur atelier, pour la bonne raison qu'ils les essayent toutes au moins une fois. Certaines rumeurs parlent même de cercles de combat secrets, où de pauvres gens recrutés par les armuriers pour quelques pièces d'or s'affrontent à mort dans une arène, simplement pour tester les performances des nouvelles armes. Mais ce ne sont que des rumeurs fausses. Enfin, il vaut mieux... et quand bien même, qui oserait accuser un armurier-forgeron, puisque la plupart des fonctionnaires royaux possèdent au moins une arme olmartoise chez eux, ou même sur eux ? Vous l'aurez compris, être un armurier-forgeron - et à fortiori un armurier-forgeron réputé - est un statut non dénué d'avantages.

 Les armuriers-forgerons travaillent en priorité pour les habitants d'Olmart et leurs clients les plus anciens et les plus fidèles (les familles riches d'Olmart, certaines familles nobles, et tous ceux à qui ils sont redevables... d'une façon ou d'une autre). Mais ils ont aussi souvent participé à l'équipement des armées hiscontes. Les armes des Gardes Royaux, dont la qualité n'est plus à prouver, sont leurs oeuvres. En échange, le Roi leur accorde des privilèges pour leur approvisionnement en matières premières (divers métaux, et, dans une moindre part, le bois). Il leur est également arrivé de travailler en collaboration avec les ingénieurs royaux nains, afin d'élaborer les rouages de machines complexes ou difficiles à réaliser (les balistes des aéroptères de la Grand'Armada, par exemple, ainsi que quelques-unes des pièces de métal des vaisseaux les plus grands). Mais ces collaborations demeurent exceptionnelles, les armuriers-forgerons tenant farouchement à rester indépendants (leur esprit d'indépendance, hérité de leurs ancêtres guyrees, désole beaucoup de gens, et surtout le ministre des Armées, qui aimerait bien profiter des talents réunis des armuriers-forgerons et des ingénieurs royaux...).

De nos jours, les armuriers-forgerons ne sont guère plus d'une centaine à tenir un atelier à Olmart. Ils ne se déplacent jamais dans le reste du pays, et transmettent leur savoir de père en fils - ou de mère en fille... En dehors des armuriers-forgerons proprement dit, il existe d'autres armuriers moins réputés, chargés de la fabrication des armes "ordinaires", épées, haches et poignards tout ce qu'il y a de plus classique. Ceux-là sont relativement méprisés par les armuriers-forgerons, qui les tiennent pour des artisans médiocres. Mais n'oublions pas que "médiocre" dans la bouche d'un armurier-forgeron est tout de même une excellente garantie de qualité n'importe où ailleurs en Hiscontie...

 

Retourner à l'Index de l'Hiscontie